Peindre avec la lumière en mouvement

par Pierre Pepin

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Pierre Pepin

Professeur assistant invité, Université Bénédictine de Mesa, Arizona, médaillé de l’AQESAP

Biographie

Autres publications de cet auteur

J’aimerais partager avec vous mon expérience suite à un atelier que j’ai été invité à donner dans le cadre du Congrès de la USSEA (United States Society for Education through Art) au Queens Museum of Art de New York, le 18 juillet 2015. L’atelier Peindre avec la lumière en mouvement propose une démarche pédagogique qui combine une approche appliquée classique de l’enseignement des arts visuels à une approche multidisciplinaire touchant aux domaines des sciences, de la technologie et de la performance. Dans cet article, je vous propose un résumé de cette technique que j’ai développée au cours des dernières années et qui présente des possibilités variées et nombreuses pour les enseignants et enseignantes du domaine des arts désirant développer des situations d’apprentissage intégrant une méthode et un questionnement scientifique sur la nature de la lumière.

La technique et les matériaux

Le principe de base de la technique que je propose est celui où nous utilisons d’autres moyens que ceux des pigments et du pinceau pour produire de la couleur. Ici, c’est avec le spectre lumineux que nous créons les couleurs et que nous composons sur la surface. Pour réaliser ces peintures lumineuses, j’utilise des acétates, des filtres polarisants et des sources lumineuses variées. Parmi mes outils, on retrouve des exactos, du ruban adhésif, une caméra numérique et un ordinateur portable. Ce que cette activité propose, c’est une reconstruction partielle du spectre lumineux à l’aide des matériaux énumérés plus haut. En fait, cette technique n’est pas nouvelle, car on peut la reconnaitre à travers les effets produits par plusieurs types de filtres utilisés dans l’industrie du cinéma. Souvent utilisés pour contrôler l’intensité d’une source lumineuse sur un plateau de tournage, je les utilise de mon côté pour, littéralement, peindre avec la lumière. C’est en combinant les effets produits par des filtres polarisants dans lesquels passe un rayon lumineux qu’on obtient des images telles que celles qui accompagnent cet article. Ma technique en est une qui déconstruit le spectre lumineux à l’aide d’un objet transparent pour le recomposer ensuite à l’aide d’un filtre. C’est en faisant exécuter des mouvements à ces deux interférences matérielles que l’on positionne à travers une source lumineuse que nous en venons à créer des compositions visuellement riches et complexes.

Une progression en trois étapes clés

Le concret, l’intuitif et le perceptif sont les trois composantes clés de cette démarche. En premier lieu, nous sommes amenés à nous interroger sur la nature de la lumière, sur ce qui la compose. En déconstruisant le spectre, l’apprenant découvre de quelle manière il peut le transformer à l’aide de l’outil scientifique qu’est le filtre polarisant. En constatant les effets provoqués par un tel outil, l’apprenant explore ensuite les possibilités créatives à travers la manipulation des différentes composantes qui constituent l’expérience. C’est en observant les effets produits par ses interventions qu’il recherche finalement à personnaliser et à capturer les résultats de sa performance.

Les trois grandes étapes de cette technique peuvent être adaptées à différents types de situations d’apprentissages. Elles exigent de l’élève qu’il apprenne à observer, à explorer, à manipuler les outils, et enfin à visualiser l’ensemble de sa démarche pour évaluer sa propre performance ainsi que les résultats qui en ont découlé. L’élève peut même pousser ses expérimentations au-delà des objectifs établis en classe en réinvestissant les habiletés acquises et en modifiant les étapes de l’expérience.

Le concept fondamental duquel émergent les différentes possibilités pédagogiques de cette expérience est celui où un questionnement de nature scientifique s’opère sur ce qui constitue la lumière. En développant un scénario d’apprentissage autour de cette technique, l’enseignant d’art peut explorer la gamme des couleurs. Il peut réfléchir aux questions de leur superposition et de leur complémentarité, il peut se pencher sur le phénomène du mouvement chromatique et de la transition entre les différentes teintes, il peut identifier les nombreux effets lumineux présents dans la nature à travers le spectre solaire, il peut se pencher sur les fonctions des multiples filtres dans une variété de domaines de recherche, il peut analyser la construction et le traitement de l’image numérique, etc.

Origines et développement de l’approche

Ayant toujours été attiré par les sciences, et intégrant celles-ci à mes enseignements secondaire, collégial et universitaire, j’essaie d’inclure le plus souvent possible l’outil scientifique à ma démarche de développement artistique. Lors de mes charges d’enseignement au baccalauréat en arts visuels de l’Université du Québec à Trois-Rivières, j’ai eu l’opportunité de côtoyer des chercheurs du département de sciences. C’est à cette occasion que j’ai initié mes étudiants aux techniques holographiques de développement d’images. Mes recherches doctorales ainsi que de nombreux ateliers que j’ai donnés lors de différents congrès de recherche et lors de différentes conférences en enseignement des arts m’ont permis d’expérimenter encore davantage cette approche à la fois scientifique, artistique et technologique de la peinture de lumière.

Retour sur mon passage au Queens Museum of Art

C’était pour moi la première fois que je présentais un atelier dans un contexte muséal et j’ai ainsi découvert une tout autre façon d’aborder mon atelier. J’ai alors mis l’accent sur mon rôle d’animateur en suggérant des pistes de recherche, en guidant les participants à travers leur démarche et en nourrissant mes propres questionnements à partir de leurs découvertes. L’enthousiasme des participants exprimait leur désir de connaître, d’explorer et de découvrir dans un contexte de détente, d’harmonie et de collégialité. On ressentait leur engouement et les émotions les plus variées lorsque les théories étaient enfin mises en pratiques dans le cadre de l’atelier de création. « C’est de la magie qui s’opère ! », s’exclamaient plusieurs participants. Ils étaient fascinés à la fois par la simplicité de la démarche et par les innombrables possibilités à l’intégrer aux processus de création de leur propre contexte scolaire. Je dois avouer que je ressentais moi-même une grande excitation en apercevant la composition et la décomposition des couleurs issues du travail ardu des participants. Je reçois encore des commentaires et des questions de ces derniers qui veulent maintenant mettre à l’épreuve leurs compétences en développant leur propre approche et technique de création à l’aide de la lumière en mouvement.

Une source de lumière qui est déconstruite pour être aussitôt restructurée produit des millions de couleurs par superposition et réverbération des rayons lumineux englobant les couleurs du spectre solaire. Les filtres polarisants communément utilisés au cinéma, au théâtre où à la télévision deviennent ici des assistants techniques qui permettent de dévoiler les composantes de la matière lumineuse, mais leur simple utilisation ne représente pas une fin en soi. C’est l’intervention de l’artiste, c’est sa performance et ses actions dans le dispositif de déconstruction et de reconstruction de la lumière qui constituent l’acte de création. C’est pourquoi cette technique en est une qui présentera autant de fascinantes variantes que les directions et les approches des enseignants et enseignantes qui se l’approprieront.

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